15 questions à Bashu, jeune Népalais volontaire en service civique à La Ville Davy
A l’occasion de la projection du documentaire « Népal, les routes du progrès » ce jeudi 28 mars, Bashu Dev Puri, un jeune Népalais de 20 ans, a répondu à quelques questions sur son séjour en France. Arrivé en novembre 2018, il effectue un service civique de 8 mois au collège-lycée La Ville Davy.
Quel est ton statut en France aujourd’hui ?
Je suis un volontaire en service civique. J’ai pu me porter volontaire grâce à l’Alliance Française de Katmandou et France Volontaires Inde.
Et au Népal ?
Je suis étudiant en journalisme. Pour financer mes études, je suis aussi guide de montage dans l’entreprise que mon frère a fondée. Pendant les vacances scolaires, je pars avec les touristes pendant plusieurs jours, qu’ils soient trailers ou randonneurs. Je les guide où ils souhaitent aller, en fonction de la distance qu’ils veulent parcourir et du temps qu’ils ont. J’ai appris le français à l’Alliance Française quand j’avais 15 ans, maintenant ça me permet d’accompagner des touristes français. En plus, avec mes amis et ma famille nous élevons une vingtaine de chèvres. Nous les élevons pour leur viande, avec cet élevage on souhaite développer une agriculture locale, respectueuse de l’environnement. On souhaite aussi motiver les jeunes du village, leur montrer qu’il est possible de gagner de l’argent au village.
En quoi consiste ton volontariat ?
Mes principales missions sont l’ouverture à l’international, l’interculturalité, une participation au développement de la solidarité internationale dans l’établissement scolaire auprès des élèves et du personnel, à travers des animations, projections, sorties… Je veux aussi que les élèves changent leur regard sur le Népal, leur montrer que ce pays ne résume pas seulement aux Sherpas, à l’Everest, aux tremblements de terre. J’assiste aux cours d’anglais de certaines classes, je reste à leur disposition s’ils ont besoin d’aide.
Que penses-tu de l’organisation des cours, de la formation des jeunes ?
Les jeunes ici ont des journées vraiment denses, très organisées. En France, je trouve que les élèves ont à leur disposition beaucoup de matériel pédagogique, beaucoup de formations leur sont proposées, au Népal les choix d’orientation sont peu nombreux. En plus, les cars viennent les chercher directement à la sortie de l’école comme à La Ville Davy. Au Népal c’est uniquement dans les grandes villes qu’on peut prendre le car, quand on habite dans un village il n’y a pas de bus scolaire.
Quelles sont tes relations avec les élèves de La Ville Davy ?
Très amicales, je suis souvent avec les élèves, même à l’extérieur de l’école. J’apprécie énormément être avec eux. A mon arrivée, j’ai trouvé que les élèves étaient excités, contents de m’accueillir. J’avais l’impression qu’ils avaient vraiment envie de me faire découvrir leur pays, leur culture. En retour, ils me posaient beaucoup de questions sur le Népal, sur moi, ma culture
Recommanderais-tu ce volontariat à un(e) jeune Népalais(e)? Que lui dirais-tu ?
Bien sûr, à 110%. Je lui dirai que d’être volontaire c’est une place unique, on apprend beaucoup, on grandit beaucoup aussi, on rencontre du monde, on évolue. Le volontariat est vraiment une belle opportunité si on souhaite découvrir d’autres pays ou façons de voir les choses…
Quels sont tes projets après ton volontariat ?
Je souhaite continuer à étudier, voyager un peu puis m’installer définitivement au Népal. Je compte aussi développer mon activité de guide touristique, rendre le Népal attractif. Je veux vraiment que les touristes voient le Népal sous une autre facette, pas seulement celle de l’ascension de l’Everest, montrer qu’il y a autre chose à découvrir.
Depuis ton arrivée en novembre, as-tu pu découvrir la France ?
Oui, énormément, je me suis promenée du côté des Pyrénées, des Alpes. Mais aussi à Paris, Lyon, Dinard, Saint-Malo, Brest. J’ai également découvert l’Espagne et la Nouvelle Aquitaine. J’ai aussi découvert la culture française, sa gastronomie, son modèle social, les habitudes des français.
Quelle est ta prochaine destination en France et à l’étranger ?
La Rochelle, peut-être Lille, le Mont-Saint-Michel. J’aimerais bien découvrir le Brésil, peut-être y travailler temporairement dans quelques années. L’Afrique m’attire également.
Es-tu familiarisé avec la culture française ?
Pas tout à fait, j’apprends tous les jours ! Mon intégration s’est très bien passée. J’ai rapidement fait beaucoup de rencontre, je me suis investi dans des associations sportives comme les Coureurs des Kaolins à Quessoy. Trégueux Solidarité a organisé des évènements auxquels j’ai participé. Par contre, j’ai un peu de mal avec tout ce qui est formel, administratif, je n’ai pas l’habitude de ça.
Ce que tu apprécies le plus en France ?
J’ai l’impression que tout est facile ici : le transport, le cadre de vie, ce qui existe si tu tombes malade. La liberté de beaucoup de jeunes qui m’entourent : choix de leur formation, de leur sport, de leur loisir. Et surtout la nourriture, particulièrement les galettes et biscuits bretons au beurre. J’ai l’impression qu’en France manger est toujours une fête, c’est génial !
Ce que tu détestes le plus ?
Les grandes villes, notamment le fait d’être mélangé parmi des milliers de personnes, j’ai l’impression que dans ces grandes villes, nous sommes tous des inconnus, les gens ne prennent pas le temps d’aller vers l’autre. Au Népal, les gens sont moins individualistes, le sens du collectif est très présent, c’est sans doute normal dans un pays qui se développe tout doucement. Le fait que le système Népalais ne te protège pas en cas de maladie par exemple, fait qu’il y a plus de solidarité. Mon but est de trouver un travail qui me plaît, avec lequel je puisse gagner suffisamment d’argent pour mettre ma famille à l’abri en cas de problème.
Une spécificité à laquelle tu t’es rapidement habitué ?
D’être avec les gens, me faire des amis, la facilité de me déplacer. Je me suis rapidement habitué à manger avec des couteaux et des fourchettes aussi, je mange avec une cuillère uniquement au Népal.
Une spécificité à laquelle tu ne t’es pas habitué ?
J’ai du mal à comprendre l’humour français parfois. Mais je sens qu’au bout de 5 mois, je vis comme n’importe quel français : je vais voir des matchs de foot de l’EAG, je sors avec des amis, j’ai des activités sportives et associatives, je voyage, je découvre des paysages…
Ce qui va te manquer ?
La gastronomie française va beaucoup me manquer, mais surtout les amis que j’ai ici et la Ville Davy !
3 questions à Philippe BLANCHARD, coordinateur de la coopération internationale à La Ville Davy
Quels sont les intérêts pour les élèves d’être en contact avec un volontaire en service civique comme Bashu ?
Dans l’établissement nous favorisons les départs à l’étranger, pour les lycéens et étudiants. Mais tous ne partiront pas, notamment les collégiens. L’intérêt pour nos jeunes de côtoyer au quotidien un jeune Népalais est évident : découvrir et se confronter à une autre culture, échanger sur les coutumes. Les échanges peuvent se faire à tous moments, de manière informelle, sur un terrain de foot, dans un couloir … Tout peut être l’occasion de lancer de nouveaux sujets de discussion. Bashu Dev est un jeune de 20 ans. Il est certainement plus facile de rentrer en contact entre jeunes, notamment les lycéens et étudiants. Des centres d’intérêt peuvent être communs.
Pourquoi avoir fait le choix d’accueillir un service civique au sein de l’établissement ?
Nous recherchions un jeune parlant anglais pouvant participer aux cours et développer la communication des jeunes en anglais. Mais aussi pouvant proposer des activités selon ses centres d’intérêts, parler de son pays et de sa culture, religion, alimentation, histoire… Nous souhaitons donner envie de partir, dépasser ses limites dans le cadre du stage d’ouverture. Rencontrer un jeune qui a choisi de partir loin de son village doit donner envie à nos jeunes Bretons de se lancer.
L’expérience sera-t-elle reconduite dans les prochaines années ?
Bien sûr ! C’est une expérience qui sera reconduite. Une volontaire du Burkina Faso doit actuellement monter un dossier pour venir en Bretagne, toujours dans le cadre du service civique. Et après j’aimerais bien qu’un jeune d’Amérique du Sud vienne aussi découvrir la Bretagne.